Vous googlelisez-vous souvent ?
Non, et j’espère que ce n’est pas grave ! Une à deux fois par an, j’évalue sur Google ma réputation professionnelle. Plus je publie, plus je suis présente sur le web : il est donc essentiel de surveiller comment je suis exposée.
Votre première fois sur internet ?
Mon premier souvenir est lié à un usage personnel. En 1996, nous nous connections avec les moyens de l’époque : avant qu’une image ne s’affiche sur l’écran, j’avais le temps de cuisiner pour toute la famille… et pourtant nous étions très satisfaits ! Notre patience était récompensée par de nouvelles découvertes. Or, ce qu’on attend aujourd’hui c’est une réactivité immédiate : il serait impensable d’attendre pour quoi que ce soit sur le web. Et je me questionne beaucoup sur la gestion de ce gain de temps : en 15 ans, qu’en avons-nous fait ? Avons-nous pu réaliser quelque-chose d’utile ou en plus, par rapport à nos vies d’avant le haut débit ?
Un site ?
Ariege-eco.com bien entendu ! Il s’agit d’un portail d’information économique locale créé par Ariège Expansion, l’agence de développement économique du département. A son lancement en 2001, ce n’était que l’intranet métier de l’agence, mais nous étions des pilotes innovants. A l’époque, les régions françaises menaient très peu d’action pour promouvoir les nouvelles technologies. En 2005, nous avons souhaité en faire une source externe d’informations pour médiatiser nos actions économiques.
Je souligne que l’Ariège a été parmi les tous premiers départements à créer un profil sur les réseaux sociaux et à adopter une stratégie d’action numérique. Déjà en 1996, nous étions précurseurs en organisant une conférence sur les autoroutes de l’information. Nous nous interrogions sur la façon dont un territoire pouvait intégrer les NTIC. Nous avions parfois raté les vraies autoroutes, il s’agissait de ne pas rater le coche pour le numérique. Et nous avons réussi ! Nous avons convaincu les élus de l’intérêt de l’internet haut débit, puis du très haut débit, pour ce qu’ils pouvaient apporter à l’Ariège en termes d’attractivité, donc de développement économique. Encore une fois, nous avons été des pionniers ! Lorsque je vais à Toulouse ou ailleurs, je m’aperçois que l’image qu’ont les gens de notre département a évolué : nous ne sommes plus seulement associés à la montagne, aux bérets et à l’ours des Pyrénées !
Un outil ?
Je ne vais pas être bien innovante : je pense aux gestionnaires d’emails de type Outlook. Je reconnais qu’ils sont chronophages, mais ce sont finalement de formidables réservoirs d’informations (alertes, flux, newsletters sectorielles) classées par strates temporelles. Je pourrais utiliser un outil de veille plus ludique ou pratique, mais je serais perturbé par un flot ininterrompu d’informations. Comme tout réservoir de stockage, il faut quelquefois le vider, faire un grand nettoyage. Mais ce qui me plaît toujours dans ce « vieil » outil, c’est la possibilité de maîtriser son temps. Je me pose, me connecte, parcours mes newsletters qui sont des supports d’information pré-digérées et non du tout-venant. Je reste ainsi maitresse de mon précieux temps !
Un projet, un exemple, un acteur à suivre ?
Ludovic Le Moan, fondateur de Sigfox, la startup toulousaine dont tout le monde parle. Nous avons eu le plaisir de l’accueillir en Ariège voilà quelques années pour lui faire découvrir notre pépinière d’entreprise dédiée aux technologies de l’information. Ludovic est tombé sous le charme du site de Saint-Lizier et a décidé d’y installer ses salariés en télétravail. Ils y trouvent de meilleures conditions de travail, avec une très bonne connexion internet, et un cadre de vie exceptionnel au pied du Mont Valier.
Je tiens encore une fois à souligner que l’Ariège fait partie des départements pionniers en matière de haut-débit et de technologies numériques. C’est un atout majeur pour attirer les entreprises ou développer le télétravail. C’est ce que nous promouvons chaque jour avec Ariège Expansion.
Ce que vous détestez sur internet ?
Ce qui m’exaspère particulièrement, ce sont les personnes qui adoptent des comportements inacceptables car ils sont protégés par l’anonymat offert par le web, des comportements qu’ils n’assumeraient pas IRL (in real life = dans la vraie vie). Toute cette haine qui se décharge dans les commentaires des sites d’information et leurs pages Facebook… Il en va de même dans le monde du travail où il est tout de même plus simple de se lever de son bureau que de se cacher derrière son écran.
Contribuez-vous personnellement à internet ?
Oui, mais essentiellement à titre professionnel, car je ne peux plus me contenter de rester passive. La promotion que je fais de l’Ariège sous son aspect économique doit passer par le web. Le département est trop souvent cantonné à l’économie touristique, la seule économie visible. Or, nous avons aussi de l’industrie de pointe, des services, de l’artisanat de production. Je participe activement à la notoriété économique du département, en gardant bonne mesure pour ne pas paraître partie-prenante. Je cherche à rendre crédibles les contenus que je produis ou diffuse, pas à en faire la propagande ; je m’efforce de faire preuve de sincérité dans ma démarche.
Il y a quelques années, je rédigeais des communiqués de presse adressés aux médias économiques régionaux. Aujourd’hui, je cherche à devenir à la fois une source de production et de diffusion d’information, via le site d’Ariège Expansion, les réseaux sociaux, la curation de contenus… Par exemple, lorsque j’organise une conférence de presse pour une entreprise ariégeoise, je diffuse directement ses contenus sur Ariege-eco.com afin de communiquer en interne et en externe. Cela constitue une base de données extrêmement riche sur le tissu économique local, mais aussi un parfait outil de prospection et de promotion. En faisant des recherches sur le web, ou en suivant les réseaux sociaux, les entreprises ont en effet plus de chances de tomber sur les publications d’Ariège Expansion.
Par exemple, au moment où Xavier Wagner, le fondateur de la startup Smart Risks, commençait à s’intéresser à la Silver Economie (à savoir l’économie au service des séniors) et cherchait un territoire où le sujet pouvait être compris, il est tombé sur nos contenus web. Séduit, il a alors implanté son entreprise à Foix : elle propose une plateforme intelligente de prévention des risques domestiques liée à la perte d’autonomie des séniors. Un sujet totalement en phase avec les sujets économiques que nous promouvons. Et je pourrais vous citer plusieurs histoires d’entreprises qui ont commencé ainsi !
L’internet de demain, vous le voyez comment ?
Je crois en l’intelligence humaine pour développer, à partir des technologies web, de futurs usages utiles, et que nous nous approprierons tous. Il y aura certes des réticences au début, mais elles seront rapidement balayées par les avantages que nous en tirerons au quotidien. Je ne parle pas de certains « gadgets » comme le frigo connecté, mais bien d’innovations plus transversales qui auront une réelle utilité publique. A moyen terme, les véritables objets connectés porteront des bénéfices réels qui seront transversaux à nos modes de vie et à la société.
Quel métier du web conseilleriez-vous à votre fils ou à votre fille ?
La vraie question est plutôt : « pourquoi lui conseiller un métier du web ? » Je ne suis en effet pas persuadée que les jeunes doivent devenir des spécialistes du numérique : cela devient un bagage professionnel transversal à toutes les compétences qu’ils acquièrent.
Je pense que les parents ne sont pas les mieux placés pour conseiller leurs enfants sur ce point. Je les engage plutôt à pousser leur progéniture à rebondir sur les centres d’intérêts qui leur tiennent à cœur, plutôt que de partir sur une idée de métier « digital ». C’est à partir de leur sensibilité personnelle qu’ils trouveront leur chemin professionnel.
S’il y a une fonction digitale qui sort du lot, c’est peut-être celle de community manager : elle demande de réelles qualités d’écoute, des connaissances pluridisciplinaires (économiques, sociologiques, marketing, techniques…), et une capacité à mesurer les effets des actions réalisées. Cela synthétise bien des qualités qui ne sont pas exclusivement liées au web.
Les conseils que vous donneriez à un directeur marketing ?
Il peut ne pas encore avoir intégré la culture web : la première urgence est donc qu’il se forme… ou alors qu’il regarde ses points retraite !
Qu’il prenne un jeune stagiaire à ses côtés et qu’il observe, sans a priori, comment il réagit et fonctionne au sein de son service. S’il est capable de réaliser cela, il a fait la plus grande partie du chemin vers le numérique. En effet, le web inverse les rôles au sein des entreprises. Il s’agit de faire preuve d’humilité sur la manière de voir les jeunes entrants dans la vie professionnelle : ils sont des sources inépuisables de nouvelles connaissances, de pratiques et de savoir-faire qui peuvent (et doivent) remettre en question la vision que nous avons de notre activité.
(Interview réalisé par Aurélien Miklas – rédacteur d’Objectif Papillon – agence de marketing et création de sites internet).
on Mai 26th at 14 h 46 min
L’Ariège numérique est à l’honneur, bravo !